Tout n’a pas commencé avec Jules Ferry

Une vision simpliste de l’Histoire considère que, jusqu’en 1789, l’Église exerçait une espèce de dictature sur les consciences, proche d’un totalitarisme.

Combattre une culture du mépris

Ces mots pourraient paraître superflus pour des historiens de l’éducation mais la tradition laïque, voire laïciste, ancrée en France a jeté le mépris ou l’oubli sur ce qu’a été l’action éducative catholique, au point qu’aux yeux de la masse des Français Jules Ferry apparaît encore comme un nouveau Charlemagne déchirant les ténèbres de l’obscurantisme clérical.

Ainsi, l’organisateur final d’un courant de scolarisation inventé par l’Église à partir du XVI° siècle, et dont les congrégations ont été le fer de lance, fait-il figure aujourd’hui de précurseur tandis que ses prédécesseurs sont voués aux gémonies ou à l’oubli parce que leur action et leur pensée auraient été entachées de dogmatisme.

Jules Ferry, un bon postiviste

Jules Ferry pensait en bon positiviste que l’Église, institution de l’âge théologique, n’avait aucune chance de survie à l’âge positif qu’il contribuait à inaugurer par la création de l’école laïque, gratuite et obligatoire. Donc, entaché de dogmatisme irrémédiable, l’enseignement catholique, essentiellement congréganiste, ne pouvait prétendre disposer d’une véritable pédagogie et n’avait plus qu’à disparaître.

Une conception simpliste de l’Histoire

Une telle vision est ancrée dans une conception simpliste de l’Histoire, qui considère que, jusqu’en 1789 l’Église exerçait une espèce de dictature sur les consciences, proche d’un totalitarisme. C’est d’abord commettre un bel anachronisme, mais c’est aussi faire bon marché du rôle des États médiévaux et modernes, qui ont de plus en plus affirmé leurs prérogatives face à la puissance spirituelle, au point qu’au XVIIIe siècle, avec le despotisme éclairé, nous assistons à un véritable renversement de tendance : désormais le souverain prétend assurer le pouvoir temporel et spirituel.

L’école laïque est fille du despotisme éclairé.

Ce césaro-papisme a été largement pratiqué par la Révolution Française et l’Empire. Au XIXe siècle, l’esprit républicain et laïque n’a pas été exempt de prétention à régenter les consciences. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si l’intérêt de l’État pour l’enseignement se manifeste puissamment à la fin du XVIIIe siècle, au moment où le despotisme éclairé triomphe. Dans une certaine mesure l’école laïque est fille du despotisme éclairé.

A. Lanfrey : Marcellin Champagnat et les Frères Maristes, p 9

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