La foi : un engagement qui contient toujours une part d’irrationnel

La foi s’apparente à un engagement qui, même réfléchi et argumenté, contient toujours une part d’irrationnel.

Croire, c’est aussi donner son assentiment. La foi s’apparente à un engagement qui, même réfléchi et argumenté, contient toujours une part d’irrationnel. Si ce n’était pas le cas, la croyance se confondrait avec le savoir et la foi ne se distinguerait pas de la raison. Pour Newman, cependant, le libre assentiment du croyant ne peut se réduire à l’acceptation passive d’un dogme, d’une « vérité » gravée dans le marbre. Il consiste à se mettre en chemin, à s’engager dans une direction avec l’espoir - et seulement l’espoir - d’arriver à bon port.

En définissant de cette façon l’assentiment au christianisme, on exclut tout risque de clôture dogmatique, toute arrogance cléricale. En choisissant de croire comme cela, on ne s’en remet pas les yeux fermés à une vérité toute faite. On se propose plus modestement de partir à sa rencontre. Cette découverte m’a aidé à mieux accepter ce que je vivais moi-même. J’ai cessé d’être paralysé par le doute comme je l’étais auparavant. Le doute, y compris le plus radical, fait partie intégrante de la croyance et, dans une moindre mesure, de la foi.

La volonté joue un rôle d’arbitrage ultime. Pour cette raison, on ne peut accueillir sans réserve le prétendu constat si souvent exprimé : « J’ai perdu la foi. » Ce n’est pas si simple. On ne « perd » pas la foi comme on perd ses clés. Le mécanisme de la décroyance est plus obscur ; il trahit une exténuation de la volonté, l’abandon plus ou moins conscient d’un engagement qu’on ne peut plus ou qu’on ne veut plus tenir.

Ce n’est pas la foi qu’on perd, c’est la volonté de croire qui faiblit. On doit citer ici la remarque du philosophe juif Paul-Louis Landsberg, un compagnon de la revue Esprit, mort en 1944 : « S’engager, c’est adhérer à une cause imparfaite. » Ne plus croire, c’est refuser d’assumer plus longtemps le poids de cette « imperfection ». Les raisons qui favorisent la croyance ou déclenchent la décroyance sont donc beaucoup moins simples qu’on l’imagine. C’est vrai pour la croyance politique mais ça l’est aussi pour la foi religieuse.

Jean-Claude Guillebaud : Comment je suis redevenu chrétien p. 175

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