Fr. Varillon : La Vierge Marie : chaleur et sobriété de la foi de l’Église

Le Credo est d’une remarquable sobriété. Nous devrions, nous aussi, être très sobres, surtout quand nous parlons de Marie.

Le Credo est d’une remarquable sobriété. Nous devrions, nous aussi, être très sobres, surtout quand nous parlons de Marie. L’outrance et l’intempérance de la parole aboutissent toujours à rabaisser ce que l’on voudrait exalter.

Avec les meilleures intentions du monde, on donne libre cours à l’imagination, à la sensibilité, à la curiosité même. Et l’on risque d’oublier que l’Évangile impose de mortifier devant le mystère de Dieu la curiosité, l’imagination et la sensibilité qui se déploient trop souvent au niveau de l’épiderme et aux dépens de la profondeur.

La sobriété n’exclut pas la chaleur.

La véritable intimité n’est ni sèche ni froide. Il y a une louange merveilleuse dans le silence aimant. Louer quelqu’un en effet, c’est lui faire savoir qu’il est digne d’être aimé. Or cela, on le signifie plus éloquemment par un simple regard qu’avec la profusion des mots.

Chaleur et sobriété : c’est toute la vie profonde de l’Église. L’une ne va jamais sans l’autre. La chaleur se traduit par le jaillissement spontané et ininterrompu de la prière dans le peuple de Dieu. La sobriété est l’apanage des définitions dogmatiques : quand l’Église le juge nécessaire, elle formule brièvement et nettement ce qui doit être affirmé pour que la lumière qui vient du Christ soit correctement accueillie. Si la piété n’était pas éclairée par le dogme, elle aurait bien du mal à éviter l’excès, l’outrance et donc la déviation. Mais si la formulation dogmatique n’était pas vivifiée par l’élan chaleureux du cœur, elle serait sèche comme un théorème, abstraite et finalement stérile. Pour les âmes affamées, elle serait comme de la pierre, alors qu’elle doit être comme du pain.

Depuis le début de son histoire, l’Église réfléchit sur le mystère du Christ vrai Dieu et vrai homme. L’Incarnation est le centre de tout, le cœur du Réel, la Réalité même. Non pas un mystère parmi les mystères, mais le Mystère.

La réflexion sur Marie accompagne la réflexion sur le Christ

Toutefois il ne se peut pas que la réflexion sur Marie n’accompagne la réflexion sur le Christ. Accompagnement : le mot a été prononcé, paraît-il, par des observateurs de l’Orient chrétien au dernier concile. Il est très éclairant. Il y a la mélodie, et il y a son accompagnement. C’est la mélodie qui importe, et si l’accompagnement importe aussi, c’est de façon subordonnée et en fonction de la mélodie. Un accompagnement musical n’est pas entendu pour lui-même et indépendamment de la mélodie, mais uniquement dans sa relation avec celle-ci.

C’est bien ainsi que l’Église a toujours compris les choses. Elle a prié Marie, elle a formulé dogmatiquement la grandeur de Marie, mais toujours uniquement comme un accompagnement de sa prière au Christ et de sa réflexion sur le Christ. Un accompagnement, non point arbitraire, mais nécessaire.

Comme l’écrit le cardinal Ratzinger, la dévotion mariale ne peut reposer sur une mariologie qui serait une espèce de deuxième édition réduite de la christologie ; on n’a ni droit ni motif d’établir cette sorte de duplicata. Les Pères de l’Église ont toujours vu en Marie la figure de l’Église, la figure de l’homme croyant qui ne peut arriver à la réalisation plénière de lui-même que par le don de l’amour, ce que la théologie appelle la Grâce. Le Christ est le Don donné ; Marie, le Don accueilli.

François Varillon, extraits de ses conférences
cf « Joie de croire, joie de vivre », p. 112

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